Je sais pas...

Publié le par EDG-E

“Je sais pas.” C’est la conclusion à laquelle j’arrive le plus souvent en ce moment. A chaque fois c’est la même chose, je me lance avec élan dans la défense d’une thèse que je crois imparable…j’ai toujours l’impression qu’elle va révolutionner ma conception des choses!… et puis je pense… je la mets à l’épreuve… mais j’ai tellement envie d’y croire que je commence à écarter les faits qui ne collent pas…et plus je pense, plus j’en écarte…et puis j’en écarte encore…jusqu’à un certain seuil où … où je ne sais plus… l’élan retombe alors comme un soufflet et j’en arrive à la conclusion, toujours la même, “de toutes façons c’est beaucoup trop compliqué, et j’y connais rien, j’vois pas pourquoi je m’acharnerais à défendre ce point de vue alors que j’en sais rien!”

C’est vrai j’en sais rien… Je ne sais rien…

Enfin si, je sais au moins une chose, “je sais que je ne sais pas” pour citer Socrate. C’est le début de la connaissance selon lui. Douter, c’est aussi la méthode que préconnise Descartes dans son célèbre discours du même nom… On a vu ce que ça a donné… Le sollipsisme est l’énemi de la science.

Douter de tout c’est liquéfier les piliers qui sous-tendent l’édifice de la connaissance : on ne peut plus rien bâtir!

Alors il faut croire?

Non. Il faut faire semblant. Il faut croire à une théorie sans s’y attacher affectivement : sans vraiment y croire. Car la croyance implique un investissement : lorsqu’on croit on prend un risque : celui d’avoir tort, celui de perdre sa crédibilité, de perdre sa place…

Mais est-il possible de réussir à construire sans s’investir? N’est-ce pas cette peur d’être décrédibilisé qui pousse les chercheurs à chercher?

Bien sur que si… Malheureusement… L’homme n’est pas un être rationnel, c’est un être affectif. La vie est une succession d’affects (Damasio l’a trés bien montré dans “l’erreur de Descartes”).

La croyance, subjective (relative au sujet), pollue la connaissance objective et universelle.

Mais n’est-ce pas là une nouvelle thèse que je suis en train de soutenir?

Si.

Il va maintenant me falloir la défendre, la mettre à l’épreuve des contres exemples, jusqu’à arriver, peut-être, à ce fameux “en fait, j’en sais rien!”.

Mais faisons comme si elle convenait.

Il y a quelques jours, sur arte était diffusé un documentaire proposant une nouvelle version de l’évolution développée par l’anthropologue Anne Dambricourt. Selon elle, le moteur de l’évolution des espèces, et plus particulièrement du genre homo, serait interne : en quelques sorte, les gènes architectes seraient programmés de manière à modifier la morphologie de l’individu (l’os sphénoïde notamment) pour que sa complexité croisse. Le devenir des êtres vivants serait donc en quelque sorte attiré par un but qui serait celui d’une complexification croissante de leur organisation et d’une amélioration de leurs capacités…

A l’inverse, la théorie classique de l’évolution postule que : toutes les possibilités de formes de vie sont essayées, et seules celles qui sont adaptées à l’environnement se perpétuent : c’est la sélection naturelle (c’est une version simplifiée, mais c’est à peu prés ça).

Jusqu’à hier, j’étais fermement convaincue et même persuadée par la théorie de Darwin. La théorie de Mme Dambricourt me faisait presque rire… Mais qui je suis pour juger et pour savoir? Mme Dambricourt est chercheuse au CNRS et dirige un laboratoire. Pas moi. Mme Dambricourt a élaboré une théorie que certains autres chercheurs aprouvent. Pas moi. Mme Dambricourt a publié un livre qui s’est vendu à de trés nombreux exemplaires… Pas moi.

Elle doit donc avoir des raisons, et même des bonnes raisons, pour soutenir sa théorie!

Alors je suis allée voir.

En effet, il y a beaucoup de point obscurs dans la théorie de l’hominisation d’Yves Coppens… Notamment Toumaï, un de nos ancêtres, qui pose problème et détruit sa théorie de l’East side story…

De même, les repliement successifs du sphénoïde auxquels s’est intéressée Mme Daubricourt sont quelque chose de tout à fait surprenant dans leur périodicité, et ne sont pas explicables par la théorie de Darwin (en tous cas à l’heure actuelle..) Alors…?

Alors l’impossibilité de l’omnipotence implique ceci qu’une théorie ne peut être que réfutée et jamais démontrée. Et comme l’émergence d’une nouvelle théorie dépend du temps que l’homme met à se détacher des anciennes, j’ai tendance à penser qu’il faut tout faire pour éviter de prendre racines.

Voila pourquoi j’ai peur de croire.

Publié dans Myself

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